Cirrhose hépatique: Comprendre et Agir

Publié le 01/02/2025
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  1. La cirrhose hépatique est une maladie irréversible du foie marquée par une fibrose étendue et une distorsion architecturale, souvent asymptomatique au stade compensé.
  2. Les causes majeures sont la consommation chronique d’alcool, les hépatites virales B/C et la stéatohépatite non alcoolique (NASH) associée au syndrome métabolique.
  3. Les signes cliniques incluent fatigue, perte d’appétit, ascite, hypertension portale (varices œsophagiennes), encéphalopathie hépatique et risque de carcinome hépatocellulaire.
  4. Le diagnostic repose sur l’interrogatoire, les bilans biologiques (INR, albumine, plaquettes), l’élastographie (FibroScan®) et l’échographie abdominale avec dépistage semestriel du CHC.
  5. La prise en charge associe sevrage alcoolique, antiviraux pour hépatites, régime hyposodé et protido-énergétique, diurétiques, bêta-bloquants, et transplantation hépatique selon les critères de Milan.

La cirrhose hépatique représente une pathologie hépatique grave et irréversible, caractérisée par une fibrose étendue et une distortion architecturale du foie. Principalement causée par la consommation excessive d’alcool, les hépatites virales chroniques (B et C) et la stéatohépatite non alcoolique (NASH), cette maladie évolue souvent de manière silencieuse avant de se manifester par des complications potentiellement mortelles. Les avancées récentes en diagnostic non invasif et en thérapies antivirales ont transformé la prise en charge, mais le pronostic reste étroitement lié à la détection précoce et à l’adaptation du mode de vie. Ce rapport synthétise les connaissances actuelles sur les mécanismes, les manifestations cliniques, les stratégies diagnostiques et les approches thérapeutiques, en s’appuyant sur les recommandations des sociétés savantes françaises et européennes.

Étiologie et Facteurs de Risque

Causes Majeures de la Cirrhose

La cirrhose résulte d’une agression hépatique chronique, conduisant à une inflammation persistante, une fibrose et une régénération nodulaire. Trois étiologies dominent :

  1. Consommation chronique d’alcool : Responsable de 50 à 75 % des cas, l’alcool induit une stéatose, une hépatite alcoolique et une fibrose progressive.
  2. Hépatites virales : Les virus B (VHB) et C (VHC) provoquent une inflammation chronique, avec un risque accru de cirrhose après 20 à 30 ans d’infection non traitée. Le VHC, en particulier, était historiquement impliqué dans 15 à 25 % des cas, mais les antiviraux à action directe (AAD) ont réduit ce fardeau.
  3. Stéatohépatite non alcoolique (NASH) : Associée au syndrome métabolique (obésité, diabète), elle représente une cause croissante, notamment dans les pays industrialisés.

Causes moins fréquentes incluent l’hémochromatose génétique, les maladies auto-immunes (cirrhose biliaire primitive) et les médicaments hépatotoxiques.

Facteurs Aggravants

Le tabagisme et les comorbidités métaboliques (diabète, dyslipidémie) accélèrent la progression vers la fibrose. Une alimentation déséquilibrée et la malnutrition aggravent également le pronostic en compromettant la régénération hépatique.

Manifestations Cliniques et Complications

Phase Asymptomatique (Cirrhose Compensée)

Près d’un tiers des patients restent asymptomatiques pendant des années, le foie conservant une capacité fonctionnelle suffisante malgré les lésions. Des signes non spécifiques comme une fatigue ou une perte d’appétit peuvent néanmoins survenir.

Phase Symptomatique (Cirrhose Décompensée)

La décompensation marque l’apparition de complications graves :

  • Ascite : Accumulation de liquide dans l’abdomen, présente chez 50 % des patients dans les 10 ans suivant le diagnostic.
  • Hypertension portale : Entraîne des varices œsophagiennes ou gastriques, avec un risque hémorragique majeur.
  • Encéphalopathie hépatique : Troubles neuropsychiatriques liés à l’accumulation d’ammoniac.
  • Carcinome hépatocellulaire (CHC) : Surveillé par échographie semestrielle, il survient dans 1 à 4 % des cas annuels.

Autres complications incluent le syndrome hépatorénal, les infections bactériennes spontanées et l’ostéoporose.

Approche Diagnostique

Bilan Initial

  • Interrogatoire et examen clinique : Recherche d’érythrose palmaire, d’angiomes stellaires ou d’une splénomégalie.
  • Biologie sanguine : Thrombopénie, hypoalbuminémie, et élévation de l’INR reflètent l’insuffisance hépatique. Les tests virologiques (VHB, VHC) et métaboliques (ferritine, bilan lipidique) identifient l’étiologie.

Imagerie et Techniques Non Invasives

  • Échographie abdominale : Détecte les nodules de régénération, l’hypertension portale et l’ascite.
  • Élastographie (FibroScan®, IRM) : Mesure la rigidité hépatique, corrélée à la fibrose. Ces méthodes ont supplanté la biopsie dans de nombreux cas.
  • Biopsie hépatique : Réservée aux diagnostics incertains, elle confirme le stade F4 de la fibrose.

Surveillance

Un suivi régulier inclut :

  • Dépistage du CHC : Échographie et dosage de l’alpha-fœtoprotéine tous les 6 mois.
  • Endoscopie digestive : Détection des varices œsophagiennes chez les patients à risque.

Prise en Charge Thérapeutique

Traitement Étiologique

  • Sevrage alcoolique : Essentiel pour ralentir la progression, avec un accompagnement psychologique et médicamenteux (benzodiazépines en cas de sevrage sévère).
  • Antiviraux : Les AAD (sofosbuvir, ledipasvir) guérissent >95 % des hépatites C, réduisant le risque de cirrhose. Le traitement du VHB (ténofovir, entécavir) supprime la réplication virale.
  • Prise en charge de la NASH : Perte poids, exercice physique, et médicaments (pioglitazone, vitamine E) améliorent l’histologie hépatique.

Gestion des Complications

  • Ascite : Régime hyposodé (<2 g/j), diurétiques (spironolactone) et ponctions évacuatrices.
  • Varices œsophagiennes : Bêta-bloquants non cardiosélectifs (propranolol) ou ligature endoscopique.
  • Encéphalopathie hépatique : Lactulose et rifaximine réduisent l’ammoniémie.

Transplantation Hépatique

Indiquée en cas de CHC précoce ou insuffisance hépatique terminale, elle offre une survie à 5 ans de 70 à 85 %. Les critères de Milan (nodule unique ≤5 cm ou ≤3 nodules ≤3 cm) guident l’éligibilité.

Modifications du Mode de Vie

Alimentation

Un régime méditerranéen est préconisé :

  • Protéines : 1,2 à 1,5 g/kg/j pour prévenir la sarcopénie, en privilégiant les sources végétales et les poissons gras.
  • Sodium : Limité à 3 g/j en cas d’ascite.
  • Éviter : Alcool, charcuteries, sucres raffinés et graisses saturées.

Activité Physique

L’exercice modéré (marche, natation) améliore la masse musculaire et réduit le risque de complications métaboliques.

Prévention des Infections

Vaccination contre l’hépatite A/B, la grippe et le pneumocoque est cruciale, associée à une hygiène rigoureuse pour limiter les infections opportunistes.

Perspectives et Recherche Récentes

Réversion de la Fibrose

Des études suggèrent que le traitement précoce de la cause (ex. éradication du VHC) permet une régression de la fibrose, même au stade de cirrhose compensée. La notion de « recompensation » émerge, définie par la stabilisation des fonctions hépatiques après contrôle étiologique.

Anticoagulation dans l’Hypertension Portale

Les anticoagulants directs (DOACs) sont évalués pour prévenir la thrombose veineuse porte chez les patients Child-Pugh A, avec des résultats préliminaires encourageants.

Thérapies Cellulaires et Géniques

Les essais sur les cellules souches mésenchymateuses et les modulateurs de gènes (ex. CRISPR-Cas9) visent à régénérer le parenchyme hépatique, offrant un espoir pour les stades avancés.

Conclusion

La cirrhose hépatique demeure un défi de santé publique, avec une morbidité élevée malgré les progrès thérapeutiques. Une approche multidisciplinaire intégrant le sevrage alcoolique, le contrôle des comorbidités et la surveillance active des complications est essentielle. L’avènement des antiviraux et des techniques non invasives a révolutionné le pronostic, mais la prévention primaire (vaccination, lutte contre l’obésité) reste la pierre angulaire. Les futures recherches sur la régénération hépatique et les biomarqueurs prédictifs ouvrent la voie à une médecine personnalisée, visant autant la guérison histologique que l’amélioration de la qualité de vie.

Dr. Dominique HOLCMAN
Médecin généraliste
Médecin généraliste depuis plus de 30 ans, le Dr. Holcman est partenaire et rédacteur chez Biloba. Engagé dans des actions humanitaires, il met son expertise au service de tous, avec une attention particulière portée à l'écoute, à la prévention et à l'accès aux soins.
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Bibliographie

Cirrhose

Association Française pour l’Étude du Foie • 2023

L’hépatite C

Ministère des Solidarités et de la Santé • 2023

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