- La sinusite est une inflammation des sinus paranasaux, multifactorielle (virale, bactérienne, allergique, anatomique), se manifestant par une obstruction nasale et des douleurs faciales.
- Les symptômes typiques incluent douleur faciale unilatérale, obstruction nasale avec sécrétions purulentes, anosmie et parfois fièvre ou complications orbito-crâniennes.
- La sinusite aiguë (<4 semaines) survient souvent après un rhume et se traite médicalement, tandis que la forme chronique (>12 semaines) nécessite un bilan approfondi et un suivi ORL.
- Le traitement associe lavages nasaux, corticoïdes intranasaux, antalgiques, antibiotiques si nécessaire et, en cas d’échec, chirurgie endoscopique ou biothérapies ciblées.
- La prévention repose sur la vaccination (pneumocoque, grippe), l’éviction des allergènes, le contrôle de l’asthme et la consultation d’un professionnel en cas de symptômes persistants ou de complications.
L'inflammation des sinus paranasaux, communément appelée sinusite, constitue une pathologie ORL multifactorielle dont l'incidence annuelle atteint 10 à 15% de la population générale. Cette affection se caractérise par un tableau clinique polymorphe associant obstruction nasale, douleurs faciales et altération de l'odorat, avec des répercussions significatives sur la qualité de vie. Les avancées récentes en immunologie et microbiologie ont permis de mieux appréhender les interactions complexes entre facteurs environnementaux, microbiote sinusien et réponse immunitaire locale. Ce travail synthétise les données épidémiologiques, physiopathologiques et thérapeutiques actuelles, en intégrant les recommandations des sociétés savantes européennes et françaises.
Mécanismes physiopathologiques et étiologies
Anatomie fonctionnelle des sinus
Les cavités sinusiennes, réparties en quatre paires (maxillaires, frontales, ethmoïdales, sphénoïdales), assurent une triple fonction de résonance vocale, d'allègement crânien et de conditionnement de l'air inhalé. Leur muqueuse ciliée, recouverte d'un film mucociliaire, constitue une barrière mécanique et immunologique essentielle contre les agents pathogènes. La perturbation de ce système de clairance, qu'elle soit d'origine infectieuse, allergique ou anatomique, initie le processus inflammatoire sinusien.
Facteurs étiologiques prédisposants
Les études épidémiologiques identifient trois catégories principales de facteurs déclenchants :
Infectieux : Les rhinovirus (30-50% des cas) et bactéries (Streptococcus pneumoniae, Haemophilus influenzae) colonisent la muqueuse altérée par une infection virale préalable dans 90% des sinusites aiguës bactériennes. Les infections fongiques, principalement Aspergillus spp., concernent 5-10% des formes chroniques immunocompétentes.
Allergiques : La rhinite allergique persiste le facteur de risque majeur, avec une prévalence de 60% chez les patients atteints de sinusite chronique. Les médiateurs de l'inflammation (histamine, leucotriènes) induisent une vasodilatation et une hyperplasie muqueuse responsable de l'obstruction ostiale.
Anatomiques : Les variations morphologiques (déviation septale, concha bullosa) et les lésions acquises (polypes, tumeurs) compromettent mécaniquement la ventilation sinusienne. Une étude tomodensitométrique récente démontre une prévalence de 85% d'anomalies anatomiques chez les patients présentant des sinusites récidivantes.
Profils cliniques et critères diagnostiques
Forme aiguë typique
Le tableau classique associe triade symptomatique pendant 7 à 14 jours :
- Douleur faciale unilatérale pulsatile majorée à l'inclinaison antérieure
- Obstruction nasale avec sécrétions purulentes postérieures
- Anosmie transitoire par obstruction olfactive
L'examen clinique révèle une sensibilité à la palpation des points sinusaux et un érythème muqueux à la rhinoscopie antérieure. Les critères diagnostiques de l'HAS exigent la présence d'au moins deux symptômes majeurs associés à des signes endoscopiques ou radiologiques.
Formes compliquées et situations d'urgence
5% des sinusites aiguës évoluent vers des complications orbito-crâniennes nécessitant une prise en charge hospitalière urgente :
- Cellulite orbitaire avec baisse d'acuité visuelle
- Thrombophlébite du sinus caverneux (fièvre en plateau, ophtalmoplégie)
- Méningo-encéphalite (raideur méningée, troubles de conscience)
Une étude multicentrique française (2023) identifie comme facteurs de gravité : l'immunodépression, les antécédents de chirurgie sinusienne et les souches bactériennes résistantes.
Approches thérapeutiques multidisciplinaires
Traitements médicaux de première intention
La stratégie thérapeutique s'adapte au phénotype clinique et au profil étiologique :
Sinusites virales :
- Lavages nasaux isotoniques 3x/jour pour restaurer la clairance mucociliaire
- Corticoïdes intranasaux (mométasone 200 μg/jour) pendant 14 jours
- Antalgiques paliers I-II en cas de douleurs modérées
Sinusites bactériennes :
L'antibiothérapie probabiliste (amoxicilline 3g/jour 10 jours) reste indiquée devant une aggravation après 48h ou des signes de gravité. Les alternatives en cas d'allergie (céfpodroxime 400 mg/jour) montrent une efficacité comparable dans les essais cliniques récents.
Traitements interventionnels
La chirurgie endoscopique sinusienne s'indique après échec de 12 semaines de traitement médical optimal, avec un taux de succès de 80-90% à 5 ans. Les techniques actuelles privilégient :
- Méatotomie moyenne élargie pour rétablir la ventilation maxillaire
- Ethmoïdectomie antérieure par guidage navigationnel
- Résection des polypes avec microdébrideur à aspiration
Les innovations thérapeutiques incluent l'utilisation topique d'anticorps anti-IL4/IL13 dans les formes éosinophiliques sévères, avec réduction de 70% des exacerbations dans les essais de phase III.
Perspectives préventives et suivi
La prévention primaire repose sur :
- Vaccination anti-pneumococcique et anti-grippale (réduction de 40% des récidives)
- Éviction des allergènes aéroportés (acariens, pollens)
- Optimisation du contrôle de l'asthme (Taux de NO exhalé <50 ppb)
Le suivi à long terme intègre une évaluation annuelle incluant questionnaire SNOT-22, rhinoscopie et mesure du débit nasal inspiratoire. Les modèles prédictifs combinant biomarqueurs sériques (IgE, éosinophiles) et données radiologiques permettent désormais une médecine personnalisée.
Conclusion
La sinusite, entité nosologique en constante redéfinition, nécessite une approche diagnostique rigoureuse et des stratégies thérapeutiques adaptées au terrain individuel. Les avancées récentes en immunomodulation et chirurgie mini-invasive ont transformé le pronostic des formes sévères, tandis que les recommandations actualisées insistent sur la réduction des antibiothérapies inappropriées. Une collaboration multidisciplinaire (ORL, allergologue, microbiologiste) s'avère essentielle pour optimiser la prise en charge de cette pathologie à fort impact socio-économique.
