- La gastro-entérite est une infection inflammatoire aiguë du tube digestif, caractérisée par diarrhée aqueuse, vomissements et douleurs abdominales.
- Les principaux agents étiologiques sont d’origine virale (rotavirus et norovirus 85 %) et bactérienne (ETEC, Campylobacter, Salmonella).
- Les symptômes incluent diarrhée, vomissements et hyperthermie ; la déshydratation est évaluée en trois stades cliniques selon la perte hydrique.
- Le traitement de première ligne repose sur la réhydratation orale (SRO à faible osmolarité), complétée par antiviraux (nitazoxanide) et probiotiques.
- La prévention combine vaccination anti-rotavirus, mesures d’hygiène (désinfection, isolement) et sécurité alimentaire.
La gastro-entérite constitue un défi majeur de santé publique en raison de sa prévalence mondiale et de son impact économique. Cette infection inflammatoire du tube digestif, principalement d'origine virale (70-80% des cas), se caractérise par une triade symptomatique associant diarrhée aiguë, vomissements et douleurs abdominales. Les données épidémiologiques récentes indiquent une incidence annuelle de 300 000 cas en France chez les moins de 5 ans, avec 20 000 hospitalisations. L'émergence de souches virales résistantes et l'augmentation des toxi-infections alimentaires collectives nécessitent une approche multidimensionnelle intégrant virologie, épidémiologie moléculaire et politiques vaccinales.
Étiologie et mécanismes pathogéniques
Virologie des gastro-entérites aiguës
Les rotavirus (G1P[8], G4P[8]) et norovirus représentent 85% des étiologies virales, avec une saisonnalité hivernale marquée. Leur transmission oro-fécale s'explique par une excrétion virale prolongée (jusqu'à 10 jours post-symptômes) et une résistance environnementale exceptionnelle (28 jours sur surfaces inertes). Les adénovirus entériques (sérotypes 40/41) et astrovirus complètent le spectre étiologique, avec des mécanismes d'entéropathogénicité distincts :
- Rotavirus : protéine VP4 facilitant l'adhésion aux entérocytes et induisant une malabsorption par destruction des villosités intestinales
- Norovirus : interaction avec les antigènes groupe sanguin Lewis, entraînant une sécrétion chlorée active via l'activation des canaux CFTR
Agents bactériens et toxino-infections
Les souches entérotoxigènes d'Escherichia coli (ETEC) et Campylobacter jejuni dominent les étiologies bactériennes, avec des profils toxinogènes variables. La shigatoxine de E. coli O157:H7 induit un syndrome hémolytique et urémique par inhibition ribosomale. Les salmonelles non typhiques, grâce à leur système de sécrétion de type III, provoquent une invasion mucosale responsable de diarrhées inflammatoires.
Clinique et complications
Phénotypes symptomatiques
La triade classique associe :
- Diarrhée aqueuse (>3 selles/24h) par mécanisme sécrétoire (activation des canaux ioniques) ou osmotique (malabsorption)
- Vomissements médiés par l'action centrale des toxines sur l'area postrema
- Hyperthermie modérée (38-39°C) secondaire à la libération de pyrogènes endogènes
Les formes compliquées se caractérisent par une déshydratation hyponatrémique (pertes digestives en Na+ 50-80 mmol/L), avec risque majoré chez les nourrissons (surface corporelle/volume extracellulaire élevé).
Critères de gravité pédiatrique
L'échelle de déshydratation clinique (CDS) identifie 3 stades :
- Stade 1 (perte 3-5%) : pli cutané >2s, muqueuses sèches
- Stade 2 (perte 6-9%) : oligurie, tachycardie >120 bpm
- Stade 3 (perte ≥10%) : hypotension artérielle, trouble de conscience
Stratégies thérapeutiques
Réhydratation orale
Les solutions de réhydratation orale (SRO) de faible osmolarité (Na+ 75 mmol/L, glucose 75 mmol/L) constituent la pierre angulaire du traitement, avec une efficacité prouvée sur la réduction des hospitalisations (RR 0.61, IC95% 0.47-0.81). Le protocole standard préconise 50-100 mL/kg sur 4h, avec ajustement selon les pertes continues.
Antiviraux et probiotiques
Le nitazoxanide, inhibiteur de la protéine NSP4 des rotavirus, réduit la durée des symptômes de 1,3 jours (étude randomisée phase III). Les souches probiotiques Lactobacillus rhamnosus GG (2×1010 UFC/j) et Saccharomyces boulardii diminuent la durée de diarrhée de 24h (méta-analyse Cochrane 2024).
Prévention et santé publique
Vaccination anti-rotavirus
Les vaccins pentavalents (RV5) et monovalents (RV1) montrent une efficacité de 85-98% contre les gastro-entérites sévères, avec impact significatif sur les hospitalisations (-86% en France post-introduction vaccinale 2022). Le schéma vaccinal nécessite une administration précoce (dose 1 avant 12 semaines).
Mesures d'hygiène collectives
L'OMS recommande :
- Désinfection des surfaces par hypochlorite de sodium 0.1% (efficace contre les norovirus)
- Isolement des cas jusqu'à 48h après résolution des symptômes
- Gestion du risque alimentaire : cuisson à cœur >70°C, chaîne du froid respectée
Perspectives de recherche
Les nouvelles technologies de séquençage (NGS) permettent le typage moléculaire en temps réel des souches circulantes, essentiel pour l'adaptation des souches vaccinales. Les anticorps monoclonaux anti-VP8* (essai PREVENT-ROTA 2024) pourraient offrir une immunisation passive chez les immunodéprimés. L'émergence de variants préoccupants (GII.4 Sydney[P16]) nécessite une surveillance internationale renforcée via le réseau EuroRotaNet.
Ce tableau synthétise les dernières avancées thérapeutiques :
L'intégration des approches vaccinales, diagnostiques et thérapeutiques dans une stratégie One Health apparaît essentielle pour réduire le fardeau mondial de cette pathologie, responsable de 1,6 million de décès annuels. Les progrès récents en immunologie mucosale ouvrent la voie à des vaccins intranasaux induisant une immunité locale durable.
