- L’angine bactérienne à streptocoque est due à Streptococcus pyogenes, touche surtout les enfants de 5–15 ans en hiver et nécessite un diagnostic précis pour éviter les complications.
- Les signes cliniques incluent douleur et rougeur pharyngées, fièvre >38,5 °C, exsudats amygdaliens et adénopathies cervicales, avec absence de toux et de rhinorrhée.
- Le diagnostic repose sur le score de Mac Isaac ≥2 et la réalisation d’un test rapide d’orientation diagnostique (TROD) en pharmacie ou en cabinet, avec une sensibilité de 90 % et une spécificité de 95 %.
- Le traitement de première intention est l’amoxicilline pendant 6 jours (50 mg/kg/j chez l’enfant, 2 g/j chez l’adulte), avec recours aux céphalosporines ou à la clarithromycine en cas d’allergie, et des mesures symptomatiques (paracétamol, ibuprofène, hydratation).
- Pour prévenir les complications (abcès péri-amygdalien, rhumatisme articulaire aigu) et limiter la transmission, il est recommandé de respecter les mesures d’hygiène, de dépister en collectivité et de surveiller les souches résistantes.
L’angine bactérienne à streptocoque, principalement causée par Streptococcus pyogenes (streptocoque du groupe A ou SGA), représente environ 15 % des cas d’angines chez l’adulte et jusqu’à 30 % chez l’enfant. Cette infection ORL, bien que souvent bénigne, nécessite une prise en charge rigoureuse pour prévenir des complications potentiellement graves, telles que le rhumatisme articulaire aigu ou la glomérulonéphrite. Les avancées récentes dans les stratégies diagnostiques, notamment l’utilisation généralisée des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD), ont permis de réduire la prescription inappropriée d’antibiotiques, conformément aux recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS). Ce rapport explore les aspects cliniques, thérapeutiques et épidémiologiques de cette pathologie, en s’appuyant sur les dernières données scientifiques et directives françaises.
Épidémiologie et Facteurs de Risque
Distribution Géographique et Incidence
Le streptocoque du groupe A est ubiquitaire, mais son incidence varie selon les régions. En France, les angines à SGA surviennent principalement en hiver et au printemps, avec des pics épidémiques rapportés dans des collectivités. Les données de Santé publique France indiquent une incidence annuelle moyenne de 450 cas pour 100 000 enfants de moins de 15 ans, contre 150 cas pour 100 000 adultes. Des épidémies d’origine alimentaire, bien que rares, ont été documentées, notamment liées à la contamination de produits laitiers ou de plats préparés.
Populations Vulnérables
Les enfants âgés de 5 à 15 ans constituent la population la plus touchée, avec un risque accru dans les environnements scolaires. Les adultes jeunes, en particulier ceux exposés professionnellement (enseignants, soignants), présentent également une susceptibilité accrue. Les facteurs de risque incluent la promiscuité, une immunodépression locale ou générale, et des antécédents d’infections récurrentes.
Tableau Clinique et Diagnostic
Symptomatologie Typique
L’angine à SGA se manifeste par une douleur pharyngée aiguë, une dysphagie, et une fièvre supérieure à 38,5°C. L’examen clinique révèle une érythème pharyngé, un enduit purulent sur les amygdales, et des adénopathies cervicales sensibles. Contrairement aux angines virales, la toux et la rhinorrhée sont généralement absentes. La scarlatine, forme toxinique de l’infection, associe une éruption cutanée papuleuse « en chair de poule » et une desquamation péri-orificielle.
Diagnostics Différentiels
Le diagnostic différentiel inclut les angines virales (70-80 % des cas), la mononucléose infectieuse, et des pathologies systémiques comme la maladie de Kawasaki chez le jeune enfant. La persistance de symptômes au-delà de 72 heures sous traitement ou la présence de signes de gravité (dyspnée, trismus) nécessitent une réévaluation immédiate.
Outils Diagnostiques
Le TROD, réalisable en médecine de ville depuis 2024 par les pharmaciens, offre une spécificité de 95 % et une sensibilité de 90 % pour détecter le SGA. Son utilisation est recommandée chez les patients âgés de 3 ans et plus présentant un score de Mac Isaac ≥ 2, permettant d’éviter 60 % des prescriptions antibiotiques injustifiées.
Prise en Charge Thérapeutique
Antibiothérapie Ciblée
L’amoxicilline reste l’antibiotique de première intention, prescrit à raison de 50 mg/kg/jour chez l’enfant (sans dépasser 2 g/jour) et 2 g/jour chez l’adulte, sur une durée de 6 jours. En cas d’allergie aux pénicillines, les céphalosporines (céfuroxime, cefpodoxime) ou la clarithromycine constituent des alternatives valides, avec des durées de traitement raccourcies (4 à 5 jours). L’azithromycine, en revanche, n’est plus recommandée en raison de l’émergence de résistances.
Prise en Charge Symptomatique
Les antalgiques (paracétamol) et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (ibuprofène) soulagent la douleur et la fièvre, mais doivent être utilisés avec prudence chez l’enfant en raison du risque de complications rénales ou digestives. Les mesures hygénodiététiques (hydratation, repos) complètent le traitement.
Complications et Suivi
Complications Immédiates
Les abcès péri-amygdaliens ou rétropharyngés surviennent dans 1 à 2 % des cas non traités, nécessitant un drainage chirurgical et une antibiothérapie intraveineuse. Le syndrome de choc toxique streptococcique, rare mais mortel, se caractérise par une défaillance multiviscérale et requiert une prise en charge en réanimation.
Séquelles Post-infectieuses
Le rhumatisme articulaire aigu, complication auto-immune, affecte principalement les enfants de 5 à 15 ans dans les régions à faible couverture antibiotique. La glomérulonéphrite aiguë post-streptococcique, bien que moins fréquente, peut entraîner une insuffisance rénale transitoire.
Stratégies Préventives
Mesures Hygéniques
Le lavage des mains et l’évitement des contacts directs avec les sécrétions oro-pharyngées réduisent la transmission. Les patients deviennent non contagieux 24 heures après l’initiation de l’antibiothérapie.
Dépistage en Collectivité
En contexte épidémique (écoles, crèches), le dépistage systématique par TROD et le traitement précoce des cas index limitent la propagation. La déclaration obligatoire des infections invasives à SGA permet une surveillance épidémiologique renforcée.
Conclusion
L’angine bactérienne à streptocoque, bien que souvent bénigne, requiert une approche diagnostique et thérapeutique structurée pour minimiser les complications et l’antibiorésistance. L’intégration des TROD en pharmacie et le respect des recommandations posologiques représentent des avancées majeures en santé publique. Les efforts doivent se poursuivre pour améliorer l’éducation des patients et la surveillance des souches résistantes, afin d’optimiser la prise en charge de cette pathologie ubiquitaire.
