- La cellulite infectieuse est une infection bactérienne aiguë du derme et de l’hypoderme, non purulente (Streptococcus pyogenes) ou purulente (Staphylococcus aureus).
- Elle se traduit par une rougeur, un œdème et une douleur qui s’étendent rapidement, parfois accompagnés de fièvre et de signes de gravité (hypotension, marbrures).
- Les principaux facteurs de risque sont le diabète, le lymphœdème, les plaies chroniques et l’immunodépression.
- Le traitement précoce associe une antibiothérapie adaptée (céphalosporines ou amoxicilline-acide clavulanique, alternatives en cas d’allergie) et des mesures adjuvantes (élévation du membre, antalgiques).
- La prévention repose sur l’hygiène cutanée, la prise en charge des comorbidités et la consultation médicale rapide dès les premiers signes pour éviter les complications.
La cellulite infectieuse représente une pathologie bactérienne aiguë des tissus cutanés et sous-cutanés, caractérisée par son potentiel évolutif rapide vers des complications systémiques graves en l'absence de prise en charge adaptée. Principalement causée par Streptococcus pyogenes et Staphylococcus aureus, cette infection nécessite une reconnaissance précoce de ses manifestations cliniques (érythème, œdème, douleur) et une antibiothérapie ciblée pour limiter les risques de septicémie ou de nécrose tissulaire. Les populations à risque incluent les patients présentant des facteurs de vulnérabilité cutanée (lymphœdème, diabète, immunodépression) ou des portes d'entrée bactériennes (plaies, dermatoses). Face à une suspicion de cellulite, une consultation médicale urgente s'impose pour initier un traitement antibiotique adapté et prévenir les séquelles fonctionnelles.
Physiopathologie et classification des cellulites infectieuses
Définition et mécanismes d'infection
La cellulite infectieuse correspond à une invasion bactérienne du derme profond et de l'hypoderme, déclenchant une réaction inflammatoire locale et systémique. Les streptocoques β-hémolytiques du groupe A (S. pyogenes) représentent l'étiologie dominante (50-70% des cas), suivis par S. aureus, incluant les souches résistantes à la méticilline (SARM). La pénétration microbienne survient généralement via une effraction cutanée minime (microtraumatisme, intertrigo, ulcère), exploitant les perturbations de la barrière épidermique et les défaillances immunitaires locales.
Facteurs favorisants
- Altérations cutanées chroniques : eczéma, pied d'athlète, ulcères veineux
- Troubles de la circulation lymphatique : lymphœdème primaire ou secondaire
- Comorbidités systémiques : diabète, obésité, artériopathie
- Traitements immunosuppresseurs : chimiothérapie, corticothérapie au long cours
Formes cliniques distinctes
La classification repose sur les caractéristiques phénotypiques et microbiologiques :
Manifestations cliniques et diagnostic différentiel
Tableau typique et signes d'alarme
L'apparition brutale d'une tuméfaction érythémateuse, chaude et douloureuse constitue la triade classique, principalement localisée aux membres inférieurs (75% des cas). L'extension centrifuge rapide (<24h) s'accompagne fréquemment de :
- Adénopathies régionales inflammatoires
- Traînées lymphangitiques rouges ascendantes
- Signes généraux modérés (fièvre <38,5°C, asthénie)
Les critères de gravité imposant une hospitalisation immédiate incluent :
- Hypotension artérielle (PAS <90 mmHg) ou tachycardie >110/min
- Désorientation, marbrures cutanées, oligurie
- Progression malgré 48h d'antibiothérapie orale
- Atteinte faciale avec risque de thrombophlébite cérébrale
Diagnostics différentiels essentiels
Plusieurs pathologies mimant la cellulite nécessitent une exclusion rapide pour éviter les erreurs thérapeutiques :
Thrombose veineuse profonde (TVP)
Malgré un œdème unilatéral commun, la TVP se distingue par l'absence de fièvre, une peau non érythémateuse (ou blanchissant à la vitropression), et une douleur exacerbée à la dorsiflexion du pied.
Dermohypodermite à éosinophiles (syndrome de Wells)
Cette dermatite inflammatoire atypique présente des placards urticariens évoluant vers des lésions granulomateuses, sans réponse aux antibiotiques. Le diagnostic repose sur la biopsie cutanée mettant en évidence des infiltrats éosinophiliques et des « figures en flammes ».
Goutte aiguë
L'arthrite goutteuse provoque un érythème périarticulaire intense, typiquement au niveau du gros orteil, avec hyperuricémie et cristaux d'urate au liquide synovial.
Prise en charge thérapeutique : stratégies antibiotiques et adjuvantes
Antibiothérapie probabiliste guidée par le contexte
Le choix initial dépend de la présence de pus, du terrain et du tableau de gravité :
Cellulite non compliquée (ambulatoire)
- Première intention : Céphalosporine orale (céfalexine 500 mg/6h) ou amoxicilline/acide clavulanique (1 g/8h)
- Allergie aux β-lactamines : Clindamycine 300 mg/8h ou pristinamycine 1 g/8h
- Durée : 5-7 jours, prolongée si amélioration incomplète
Suspicion de SARM communautaire
- Facteurs de risque : Antécédents de SARM, toxicomanie IV, collectivité
- Traitement : Cotrimoxazole (800/160 mg/12h) ± rifampicine 600 mg/j
Formes graves ou faciales
- Hospitalisation obligatoire avec biantibiothérapie IV : Ceftriaxone 2 g/j + clindamycine 600 mg/8h
- Ajustement selon prélèvements microbiologiques (hémocultures, ponction de bourrelet)
Mesures adjuvantes
- Surélévation du membre atteint pour réduire l'œdème
- Antalgiques : Paracétamol en première intention, éviter les AINS (risque de nécrose)
- Compression élastique après résolution de l'épisode aigu chez les patients à risque de récidive
Prévention des récidives et éducation des patients
Prise en charge des facteurs favorisants
- Soins podologiques réguliers en cas de pied d'athlète ou d'onychomycose
- Traitement du lymphœdème : Drainage lymphatique manuel, bandages multicouches
- Vaccination antistreptococcique (en cours d'évaluation)
Antibioprophylaxie au long cours
Indiquée après ≥3 épisodes annuels malgré les mesures préventives :
- Benzathine pénicilline 1,2 MU IM/mois
- Alternatives orales : Phénoxyméthylpénicilline 250 mg/12h ou érythromycine 250 mg/12h
Conclusion : l'impératif d'une prise en charge précoce et structurée
La cellulite infectieuse demeure une urgence médicale nécessitant une reconnaissance immédiate de ses signes inauguralux et une antibiothérapie adaptée au contexte clinique. La collaboration entre médecins généralistes, infectiologues et chirurgiens permet d'optimiser les délais de traitement, particulièrement crucial dans les formes nécrosantes ou sur terrain fragilisé. L'éducation des patients à risque sur les mesures préventives (hygiène cutanée, gestion des comorbidités) constitue un pilier fondamental pour réduire l'incidence des complications à long terme. Face à toute symptomatologie évocatrice, une consultation médicale sans délai s'impose afin d'éviter l'évolution vers des états septiques gravissimes, rappelant que la cellulite infectieuse tue encore aujourd'hui près de 20 000 personnes annuellement en Europe.
