- Définition : l’angine de poitrine est un syndrome d’ischémie myocardique transitoire causé par un déséquilibre entre apports et besoins en oxygène du muscle cardiaque.
- Symptômes : douleur rétrosternale constrictive de 3–15 minutes irradiant bras gauche, mâchoire ou épigastre, associée à dyspnée, sueurs ou nausées, avec formes atypiques chez les femmes et les diabétiques.
- Causes et facteurs de risque : athérosclérose coronarienne (> 70 % de sténose), hypertension, diabète, tabagisme, syndrome métabolique et prédispositions génétiques (APOE, PCSK9).
- Diagnostic : ECG au repos et à l’effort, échocardiographie et scintigraphie de stress, coronarographie (gold standard) et scanner coronaire non invasif.
- Traitements et prévention : dérivés nitrés, bêtabloquants, anticalciques, statines, antiagrégants, angioplastie ou pontage, arrêt du tabac, activité physique adaptée et réadaptation cardiaque.
L’angine de poitrine, ou angor, constitue un syndrome clinique résultant d’une ischémie myocardique transitoire, généralement provoquée par un déséquilibre entre les apports et les besoins en oxygène du muscle cardiaque. Principalement associée à l’athérosclérose coronarienne, cette pathologie se manifeste par des douleurs thoraciques caractéristiques, souvent déclenchées par l’effort ou le stress, et soulagées par le repos ou les dérivés nitrés. Les avancées récentes dans les stratégies diagnostiques et thérapeutiques, couplées à une meilleure compréhension des facteurs de risque modifiables, ont transformé la prise en charge de cette affection, réduisant significativement ses complications potentiellement mortelles comme l’infarctus du myocarde.
Physiopathologie de l’angine de poitrine
Mécanismes ischémiques et adaptations myocardiques
L’angine de poitrine survient lorsque le flux sanguin coronarien devient insuffisant pour répondre aux besoins métaboliques du myocarde. Ce déséquilibre résulte typiquement d’une sténose artérielle coronarienne dépassant 70 % de la lumière vasculaire, secondaire à la progression de plaques d’athérome. Ces plaques, composées de lipides, de cellules inflammatoires et de tissu fibreux, réduisent progressivement la perfusion myocardique, particulièrement lors d’activités augmentant la demande en oxygène (exercice, stress).
L’ischémie induit une cascade métabolique complexe : l’hypoxie cellulaire entraîne un passage au métabolisme anaérobie, générant une accumulation d’acide lactique et une déplétion en ATP. Ces perturbations ioniques altèrent la fonction contractile des cardiomyocytes et stimulent les terminaisons nerveuses sympathiques, générant la douleur caractéristique. Le système nerveux central interprète ces signaux comme une douleur thoracique rétrosternale, souvent irradiante, par activation des dermatomes T1-T4.
Formes cliniques : stabilité versus instabilité
La distinction entre angor stable et instable repose sur la dynamique symptomatique. L’angor stable survient de manière prévisible lors d’efforts comparables, avec une fréquence et une intensité constantes, reflétant une sténose coronarienne fixe. À l’inverse, l’angor instable se manifeste par des épisodes imprévisibles, survenant au repos ou pour des efforts minimes, signalant une rupture de plaque athéromateuse avec thrombose partielle. Cette dernière forme constitue une urgence médicale, annonciatrice d’infarctus dans près de 50 % des cas.
Manifestations cliniques et critères diagnostiques
Sémiologie typique et variants phénotypiques
La douleur angineuse classique présente quatre caractéristiques cardinales : localisation rétrosternale, qualité constrictive, durée de 3 à 15 minutes, et relation temporelle avec l’effort. L’irradiation vers le bras gauche, la mâchoire ou l’épigastre est rapportée chez 60-70 % des patients. Des symptômes associés incluent dyspnée, sueurs, nausées et vertiges, particulièrement dans les formes instables.
Cependant, près de 20 % des cas présentent des manifestations atypiques, notamment chez les femmes, les diabétiques et les sujets âgés. Ces formes se caractérisent par une prédominance de fatigue, malaise vague ou essoufflement isolé, retardant souvent le diagnostic. L’angor vasospastique (type Prinzmetal), bien que rare, se distingue par des crises nocturnes non liées à l’effort, déclenchées par un spasme coronarien transitoire.
Outils diagnostiques : de l’anamnèse aux techniques d’imagerie avancées
Le diagnostic intégratif associe évaluation clinique, tests fonctionnels et imagerie. L’électrocardiogramme (ECG) au repos peut révéler des anomalies de repolarisation (sous-décalage ST, onde T négative), mais reste normal dans 50 % des cas. L’ECG d’effort augmente la sensibilité à 70-80 %, en reproduisant l’ischémie sous contrainte physique.
Les techniques d’imagerie complètent le bilan : l’échocardiographie de stress détecte les anomalies de motilité pariétale, tandis que la scintigraphie myocardique évalue les défauts de perfusion. La coronarographie reste le gold standard pour visualiser les sténoses coronariennes et guider les interventions revascularisatrices. Les avancées récentes en CT-scan coronaire permettent une évaluation non invasive de la morphologie des plaques, particulièrement utile chez les patients à risque intermédiaire.
Étiologie et facteurs de risque modifiables
Athérogenèse et interactions génético-environnementales
L’athérosclérose coronarienne, processus sous-jacent dans 90 % des angors, résulte d’une interaction complexe entre prédisposition génétique et expositions environnementales. Les mutations des gènes impliqués dans le métabolisme lipidique (ex : APOE, PCSK9) augmentent la susceptibilité aux dépôts artériels. Simultanément, les facteurs acquis comme l’hypertension, le diabète et le tabagisme accélèrent la progression des lésions endothéliales.
Le syndrome métabolique émerge comme un déterminant clé, associant résistance à l’insuline, dyslipidémie athérogène (LDL élevé, HDL bas) et adiposité viscérale. Ces anomalies favorisent l’inflammation vasculaire chronique, avec infiltration macrophagique et formation de plaques vulnérables.
Stratification du risque et approche préventive
La prévention primaire cible les facteurs modifiables via des interventions multidimensionnelles. Une réduction de 10 mmHg de la pression artérielle systolique diminue le risque coronarien de 20 %. De même, l’arrêt tabagique entraîne une baisse de 50 % de la mortalité cardiovasculaire après un an. Les programmes d’activité physique adaptée améliorent la capacité fonctionnelle et stabilisent les plaques via des mécanismes endothéliaux et anti-inflammatoires.
Stratégies thérapeutiques : pharmacologie et interventions
Traitements médicamenteux : optimisation de la balance oxygène/demande
La prise en charge aiguë repose sur les dérivés nitrés (trinitrine sublinguale), vasodilatateurs coronariens rapides réduisant la précharge et la demande en oxygène. En traitement chronique, les bêtabloquants (ex : métoprolol) ralentissent la fréquence cardiaque et l’inotropisme, tandis que les anticalciques (ex : amlodipine) diminuent la postcharge. Les statines (ex : atorvastatine) stabilisent les plaques et réduisent les événements cardiovasculaires majeurs de 30 %.
L’antiagrégation plaquettaire (aspirine, clopidogrel) prévient la thrombose sur plaque rompue, cruciale dans l’angor instable. Les nouveaux anticoagulants (ex : rivaroxaban) démontrent un bénéfice supplémentaire dans les syndromes coronariens aigus à haut risque.
Revascularisation myocardique : indications et innovations
L’angioplastie coronaire avec pose de stent reste le traitement de choix pour les lésions symptomatiques ou à haut risque. Les stents actifs à libération prolongée de sirolimus réduisent la resténose à moins de 5 %. Pour les atteintes tritronculaires ou du tronc commun, le pontage aortocoronarien offre une survie supérieure à long terme, particulièrement chez les diabétiques.
Les techniques hybrides combinant chirurgie et intervention percutanée émergent pour les cas complexes, tandis que la thérapie cellulaire et les biomarqueurs d’ischémie ouvrent des perspectives personnalisées.
Pronostic et qualité de vie
Impact fonctionnel et psychosocial
L’angor stable non traité entraîne une mortalité annuelle de 3-4 %, triplant en cas d’atteinte du tronc commun. Une prise en charge optimale améliore la survie à 95 % à 5 ans. Cependant, la limitation fonctionnelle induite par les symptômes altère significativement la qualité de vie, avec un impact comparable à l’insuffisance cardiaque modérée.
Les programmes de réadaptation cardiaque, associant exercice supervisé et éducation thérapeutique, améliorent la tolérance à l’effort de 20 % et réduisent les réhospitalisations. Le soutien psychologique ciblé atténue l’anxiété et l’évitement comportemental fréquents dans cette population.
Perspectives futures et axes de recherche
Les avancées en imagerie moléculaire permettent désormais de détecter les plaques vulnérables avant leur rupture. Les thérapies géniques ciblant l’angiogenèse ou la régénération endothéliale sont en phase d’essais cliniques. Parallèlement, l’intelligence artificielle optimise la prédiction du risque individuel via l’analyse intégrative de biomarqueurs et données d’imagerie.
En conclusion, l’angine de poitrine demeure un défi de santé publique nécessitant une approche multidisciplinaire, allant de la prévention primaire aux innovations thérapeutiques. Une détection précoce et une gestion personnalisée des facteurs de risque restent les pierres angulaires pour réduire le fardeau mondial de cette pathologie.
