- La varicelle est une infection virale très contagieuse due au VZV, caractérisée par une phase d’incubation de 10–21 jours et une éruption vésiculeuse prurigineuse polymorphe.
- Les symptômes incluent fièvre modérée, asthénie, puis macules évoluant en vésicules claires, croûtes et prurit, avec un risque de surinfection bactérienne si on gratte.
- La transmission se fait par voie aérienne (gouttelettes) et contact direct avec les lésions ; l’enfant est contagieux 1–2 jours avant l’éruption jusqu’à la formation des croûtes.
- La prise en charge repose sur paracétamol, antihistaminiques et soins locaux (toilette douce, ongles courts) ; l’aciclovir est réservé aux nourrissons à risque, adultes et immunodéprimés.
- La prévention combine vaccination ciblée en deux doses (12 mois et 16–18 mois), exclusion scolaire jusqu’à cicatrisation et prophylaxie post-exposition (vaccin ou immunoglobulines).
La varicelle, maladie infantile éruptive fréquente, constitue un enjeu majeur de santé publique en raison de sa forte contagiosité et de sa prévalence élevée. Causée par le virus varicelle-zona (VZV), elle touche annuellement près de 700 000 personnes en France, dont 90 % d'enfants de moins de 10 ans. Bien que généralement bénigne, cette infection peut engendrer des complications sévères chez les nourrissons, les adultes et les personnes immunodéprimées, justifiant une approche préventive et thérapeutique rigoureuse. Ce rapport synthétise les données épidémiologiques, cliniques et prophylactiques actualisées, en s'appuyant sur les recommandations des autorités sanitaires françaises et internationales.
Épidémiologie et caractéristiques virologiques
Agent pathogène et mécanismes infectieux
Le VZV, virus à ADN appartenant à la famille des Herpesviridae, possède une particularité pathogénique unique : après la primo-infection (varicelle), il persiste à l'état latent dans les ganglions nerveux sensitifs, pouvant se réactiver des années plus tard sous forme de zona. Cette latence explique pourquoi 15 à 20 % des individus développeront un zona au cours de leur vie.
La transmission s'effectue principalement par voie aérienne via les gouttelettes de Flügge ou par contact direct avec les lésions cutanées. Une personne infectée devient contagieuse 24 à 48 heures avant l'apparition de l'éruption et le reste jusqu'à la formation des croûtes, généralement 5 à 7 jours après le début des symptômes.
Données épidémiologiques
En France, le réseau Sentinelles documente une incidence annuelle moyenne de 600 000 à 700 000 cas, avec deux pics saisonniers : printanier (mars-avril) et estival (juin-juillet). Les hospitalisations concernent principalement les complications cutanées (60 % chez les 1-4 ans), neurologiques (55 % chez les 5-14 ans) et pulmonaires (68 % chez les plus de 14 ans). La létalité globale reste faible (0,8 % des hospitalisations), mais atteint 30 % chez les nouveau-nés contaminés in utero.
Manifestations cliniques et diagnostic
Triade symptomatique caractéristique
L'infection se manifeste après une incubation de 10 à 21 jours par :
- Phase prodromique : fièvre modérée (38-39°C), céphalées et asthénie, souvent absente chez le jeune enfant.
- Éruption vésiculeuse : apparition progressive de macules érythémateuses évoluant en vésicules prurigineuses à contenu clair, puis en croûtes. Les lésions respectent le caractère polymorphe (tous les stades coexistent) et la topographie centrifuge.
- Prurit intense : responsable de surinfections bactériennes dans 3 % des cas, principalement à Streptococcus pyogenes ou Staphylococcus aureus.
Formes cliniques particulières
- Varicelle néonatale : contamination materno-fœtale avant J5 post-partum, associée à une mortalité de 30 %.
- Varicelle de l'adulte : éruption plus dense avec risque majoré de pneumopathies interstitielles (68 % des complications pulmonaires).
- Formes compliquées : syndrome de Reye (aspirine), syndromes de Guillain-Barré ou de Gianotti-Crosti.
Le diagnostic reste clinique dans 95 % des cas. La sérologie (recherche d'IgM spécifiques) ou la PCR sur liquide vésiculaire ne sont indiquées qu'en contexte de doute diagnostique ou de complication grave.
Prise en charge thérapeutique
Mesures symptomatiques
- Contrôle du prurit : antihistaminiques H1 de première génération (dexchlorphéniramine) et bains tièdes avec colloïdes d'avoine.
- Gestion de la fièvre : paracétamol exclusivement, les AINS et l'aspirine étant contre-indiqués en raison du risque de syndrome de Reye et de surinfections nécrosantes.
- Hygiène cutanée : toilette quotidienne au savon surgras sans antiseptique, ongles courts pour limiter le grattage.
Traitements antiviraux
L'aciclovir oral (20 mg/kg 4 fois/jour) est réservé aux :
- Patients immunodéprimés
- Nouveau-nés de mère infectée 5 jours avant à 2 jours après l'accouchement
- Adultes consultant dans les 24 heures suivant l'éruption.
En milieu hospitalier, l'aciclovir intraveineux (10 mg/kg/8h) s'impose pour les pneumopathies ou encéphalites.
Stratégies préventives
Vaccination
La France privilégie une vaccination ciblée plutôt que systématique, conformément aux avis du HCSP (2004) et de la HAS (2024) :
- Enfant : deux doses de vaccin monovalent (Varivax®) ou quadrivalent (Priorix-Tetra®) à 12 mois et 16-18 mois pour les collectivités à haut risque.
- Adolescent : rattrapage jusqu'à 18 ans pour les sujets non immunisés.
- Adulte :
- Professionnels de santé et de la petite enfance séronégatifs
- Femmes en âge de procréer (au moins 3 mois avant grossesse)
- Entourage de personnes immunodéprimées
L'efficacité vaccinale atteint 98,3 % après deux doses, avec une réduction de 95 % des formes graves.
Mesures d'éviction
En collectivité, l'exclusion scolaire est recommandée jusqu'à cicatrisation complète des lésions. Les sujets contacts non immunisés bénéficient d'une prophylaxie post-exposition par vaccin (dans les 3 jours) ou immunoglobulines spécifiques (chez les immunodéprimés).
Situations à risque nécessitant une consultation urgente
- Signes de surinfection cutanée : lymphangite, cellulite, fasciite nécrosante
- Atteinte neurologique : troubles de la conscience, convulsions, ataxie
- Détresse respiratoire : tachypnée, cyanose
- Grossesse : toute exposition au VZV nécessite une sérologie immédiate et l'administration d'immunoglobulines polyvalentes si séronégative.
Perspectives de santé publique
L'analyse coût-bénéfice de la vaccination universelle demeure controversée en France. Toutefois, les récentes recommandations sur le vaccin recombinant Shingrix® (2024) pour les plus de 65 ans et immunodéprimés marquent un tournant dans la prévention du zona, complication tardive du VZV. Parallèlement, le renforcement de la surveillance épidémiologique via le réseau Sentinelles permet d'ajuster les stratégies prophylactiques en temps réel.
Conclusion
La varicelle, bien que perçue comme banale, requiert une vigilance particulière chez les populations vulnérables. L'arsenal préventif, combinant vaccination ciblée et mesures d'hygiène collective, a réduit de 75 % les hospitalisations pediatricques depuis 2004. L'information des parents sur les signes de gravité et l'adhésion aux calendriers vaccinaux personnalisés constituent les piliers d'une prise en charge optimale de cette infection ubiquitaires.
Les données citées dans ce rapport proviennent des dernières mises à jour des autorités sanitaires françaises (HAS, HCSP, Santé publique France) et internationales (CDC, OMS), garantissant leur fiabilité et leur actualité scientifique.
