- La paresthésie regroupe des sensations inhabituelles comme fourmillements, picotements, engourdissements ou brûlures dues à un dysfonctionnement des nerfs sensitifs.
- Elle peut être temporaire et bénigne (compression nerveuse passagère) ou chronique, indiquant une cause sous-jacente nécessitant un diagnostic médical.
- Les causes vont de simples compressions nerveuses, carences nutritionnelles ou hyperventilation, à des affections plus graves comme le diabète, la sclérose en plaques ou un AVC.
- Une consultation médicale est nécessaire si les symptômes sont fréquents, persistants, s'aggravent ou s'accompagnent de signes alarmants (faiblesse, paralysie, troubles de la parole ou de la vision).
- Le traitement dépend de la cause identifiée, combinant prise en charge de la maladie sous-jacente, traitements symptomatiques et mesures préventives comme une bonne posture et une alimentation équilibrée.
Paresthésie : Comprendre les Fourmillements, Picotements et Engourdissements pour Mieux Agir
Vous ressentez des fourmillements étranges dans les mains, des picotements dans les pieds ou un engourdissement sur une partie de votre corps ? Ces sensations, souvent déroutantes et parfois inquiétantes, portent un nom médical : la paresthésie. Si ce terme peut sembler complexe, les sensations qu'il décrit sont, elles, très familières pour la plupart d'entre nous.
Cet article est conçu pour vous aider à y voir plus clair. Nous allons explorer ensemble, pas à pas, ce qu'est la paresthésie, pourquoi elle survient, quand elle doit motiver une consultation médicale et quelles sont les solutions pour la soulager. L'objectif est de vous fournir une information fiable, complète et rassurante pour vous guider dans la compréhension de ce qui vous arrive.
1. Qu'est-ce que la Paresthésie ? Une Définition Simple et Claire
La paresthésie n'est pas une maladie en soi, mais un symptôme. Elle désigne un trouble de la sensibilité qui se manifeste par des sensations anormales sur la peau, en l'absence de toute stimulation extérieure. Autrement dit, votre peau réagit comme si elle était touchée, piquée ou brûlée, alors que rien ne se passe.
Pour le dire avec des mots que tout le monde connaît, la paresthésie, c'est ce que l'on appelle communément :
- Des fourmillements ;
- Des picotements ;
- La sensation d'avoir des "aiguilles" ou des "épingles" ;
- Un engourdissement, comme si la zone était "en carton" ou anesthésiée ;
- Une sensation de brûlure ou, à l'inverse, de froid intense ;
- Des démangeaisons sans cause apparente.
Ces sensations proviennent d'un dysfonctionnement au niveau des nerfs sensitifs. Ces nerfs sont comme des câbles électriques qui transmettent les informations (le toucher, la chaleur, la douleur) de votre peau jusqu'à votre cerveau. Lorsque ce "câblage" est irrité, comprimé ou endommagé, le signal est brouillé, ce qui provoque ces perceptions anormales.
Il est crucial de distinguer deux types de paresthésie :
- La paresthésie temporaire : C'est la plus courante et la plus bénigne. Tout le monde l'a déjà vécue. C'est la fameuse "jambe endormie" après être resté assis en tailleur trop longtemps, ou le bras "mort" au réveil après avoir dormi dessus. Cette sensation disparaît rapidement une fois que la pression sur le nerf est relâchée et que la circulation sanguine est rétablie.
- La paresthésie chronique : C'est lorsque les sensations deviennent persistantes, fréquentes ou récurrentes. Elles ne disparaissent pas en quelques minutes et peuvent s'installer durablement. Dans ce cas, la paresthésie est le signe d'une condition sous-jacente qui nécessite d'être identifiée et traitée.
2. Les Causes Possibles : Pourquoi Moi ?
C'est la question centrale qui vous préoccupe : d'où viennent ces sensations ? Les causes de la paresthésie sont extrêmement variées. Pour ne pas vous alarmer inutilement, nous allons les aborder en partant des plus fréquentes et bénignes pour aller vers les plus rares.
Causes Courantes et Bénignes (les plus rassurantes)
Dans la grande majorité des cas, une paresthésie passagère a une cause simple et sans gravité.
- Compression nerveuse temporaire : C'est la cause numéro un. En restant dans une mauvaise position (jambes croisées, assis sur son pied, bras sous la tête en dormant), vous comprimez un nerf et les vaisseaux sanguins qui l'alimentent. Le nerf, privé d'oxygène, envoie des signaux erronés au cerveau. Les fourmillements que vous ressentez au moment de bouger sont en fait le signe que le nerf "se réveille" et que tout rentre dans l'ordre.
- Hyperventilation (crise d'angoisse ou de panique) : Lorsque vous respirez trop vite et trop profondément, vous modifiez l'équilibre entre l'oxygène et le dioxyde de carbone dans votre sang. Ce déséquilibre chimique (baisse du CO2 sanguin) peut provoquer des picotements très caractéristiques autour de la bouche, dans les mains et les pieds. C'est un symptôme impressionnant mais sans danger, qui disparaît en même temps que la crise d'angoisse.
- Carences en vitamines et minéraux : Le bon fonctionnement de nos nerfs dépend de certains nutriments. Une carence, notamment en vitamine B12, est une cause classique de paresthésies chroniques. D'autres carences peuvent être impliquées (vitamine B1, B6, cuivre).
- Déshydratation ou déséquilibre électrolytique : Les électrolytes (calcium, potassium, sodium) sont essentiels à la transmission des influx nerveux. Une forte déshydratation (après un effort intense, une gastro-entérite) ou un déséquilibre peut perturber cette transmission et causer des picotements ou des crampes.
Causes Mécaniques ou Locales (nécessitant un avis médical)
Ici, la paresthésie est due à une compression nerveuse plus durable, liée à un problème anatomique.
- Le syndrome du canal carpien : C'est l'une des causes les plus fréquentes de paresthésies dans les mains. Le nerf médian, qui contrôle la sensibilité du pouce, de l'index et du majeur, est comprimé à son passage dans un tunnel étroit au niveau du poignet (le canal carpien). Cela provoque des fourmillements, des engourdissements (surtout la nuit) et une perte de force dans la main.
- La hernie discale : Entre chaque vertèbre de notre colonne se trouve un disque qui sert d'amortisseur. Si ce disque se fissure et que son noyau gélatineux sort, il peut venir comprimer une racine nerveuse. Si cela se produit au niveau des lombaires, cela peut provoquer une sciatique (douleur et paresthésies le long de la jambe) ou une cruralgie. Au niveau des cervicales, cela peut causer des douleurs et des paresthésies dans le bras et la main.
- L'arthrose cervicale : L'usure des articulations du cou peut entraîner la formation de petites excroissances osseuses ("becs de perroquet") qui peuvent réduire l'espace disponible pour les nerfs et les comprimer.
Causes Métaboliques ou Systémiques
Parfois, la paresthésie est le symptôme d'une maladie qui affecte l'ensemble de l'organisme.
- Le diabète : C'est une cause majeure de paresthésies chroniques. Un taux de sucre trop élevé dans le sang pendant une longue période endommage les petits vaisseaux sanguins et les fibres nerveuses, en particulier les plus longues. C'est ce qu'on appelle la neuropathie diabétique. Elle commence typiquement par des picotements, des brûlures ou une perte de sensibilité dans les pieds ("en chaussettes"), puis peut remonter le long des jambes et atteindre les mains ("en gants").
- L'hypothyroïdie : Un manque d'hormones thyroïdiennes peut ralentir le métabolisme et provoquer une rétention de liquide dans les tissus, ce qui peut comprimer les nerfs et causer des paresthésies, notamment un syndrome du canal carpien.
- Les maladies rénales chroniques : Une insuffisance rénale peut entraîner une accumulation de toxines dans le sang et des déséquilibres électrolytiques qui endommagent les nerfs.
Causes plus Rares ou Graves (à aborder avec prudence)
Il est important de mentionner ces causes, non pas pour vous alarmer, mais pour souligner l'importance de consulter en cas de doute. Ces diagnostics sont beaucoup moins fréquents et sont généralement accompagnés d'autres symptômes très spécifiques.
- La sclérose en plaques (SEP) : C'est une maladie auto-immune où le système immunitaire attaque la myéline, la gaine protectrice des nerfs du cerveau et de la moelle épinière. La paresthésie est un des symptômes les plus courants de la SEP, souvent l'un des premiers à apparaître, mais elle est généralement associée à d'autres signes (troubles de la vision, fatigue intense, faiblesse, problèmes d'équilibre).
- L'Accident Vasculaire Cérébral (AVC) : Une paresthésie qui apparaît de manière brutale et soudaine, touchant un côté du corps (visage, bras et/ou jambe), est un signe d'alerte majeur d'AVC. Elle est presque toujours accompagnée d'autres symptômes (voir section suivante).
- Une tumeur : Très rarement, une tumeur cérébrale ou une tumeur située le long d'un nerf peut le comprimer et provoquer des paresthésies progressives.
- Les infections : Certaines infections peuvent atteindre les nerfs, comme la maladie de Lyme (transmise par les tiques), le zona (réactivation du virus de la varicelle qui provoque une éruption douloureuse et des paresthésies sur le trajet d'un nerf) ou le VIH.
- Les effets secondaires de médicaments : Certains traitements, notamment les chimiothérapies, certains antibiotiques ou des médicaments pour le cœur, peuvent avoir une toxicité pour les nerfs et causer des paresthésies.
- L'alcoolisme chronique : Une consommation excessive et prolongée d'alcool est toxique pour les nerfs et est souvent associée à des carences en vitamines du groupe B.
3. Quand Faut-il S'inquiéter et Consulter un Médecin ?
Cette section est votre guide pour savoir comment réagir. Toutes les paresthésies ne nécessitent pas une visite aux urgences, mais certaines sont des signaux d'alarme à ne jamais ignorer.
Consultez votre médecin traitant si :
Prenez rendez-vous avec votre médecin généraliste dans les jours ou semaines qui suivent si vous constatez que vos paresthésies :
- Sont fréquentes, reviennent souvent ou sont devenues constantes. Une jambe endormie une fois par mois, ce n'est rien. Des picotements dans les pieds tous les jours, c'est un motif de consultation.
- S'étendent ou changent de localisation (par exemple, elles commencent aux doigts et remontent dans le bras).
- Sont symétriques (touchent les deux pieds ou les deux mains en même temps).
- Sont accompagnées d'autres symptômes comme une douleur persistante, une faiblesse musculaire progressive, des crampes ou une maladresse inhabituelle.
- Apparaissent sans cause évidente (vous n'étiez pas dans une mauvaise position).
Votre médecin traitant est le mieux placé pour faire un premier bilan et vous orienter si nécessaire.
Consultez en URGENCE (appelez le 15 ou le 112) si la paresthésie :
Certains signes sont des drapeaux rouges indiquant une urgence neurologique potentiellement grave, comme un AVC. N'attendez pas, ne pensez pas que "ça va passer". Chaque minute compte. Appelez les secours immédiatement si la paresthésie :
- Apparaît de manière brutale, soudaine et intense.
- Est accompagnée d'une faiblesse musculaire soudaine ou d'une paralysie d'un membre ou d'une partie du visage (impossibilité de sourire d'un côté, bras qui "tombe").
- Est associée à des difficultés à parler (mots qui ne sortent pas, propos incohérents) ou à comprendre ce qu'on vous dit.
- S'accompagne d'une confusion soudaine, d'une désorientation ou de troubles de la vision (vision double, perte de la vue d'un œil).
- Est associée à un mal de tête violent et inhabituel, "le pire de votre vie".
- Est suivie d'une perte de contrôle de la vessie ou des intestins.
Ces signes correspondent à l'acronyme VITE (Visage, Incapacité de lever un bras, Trouble de la parole, Extrême urgence) qui permet de reconnaître un AVC.
4. Comment le Diagnostic est-il Posé ?
Si vous consultez pour une paresthésie chronique, votre médecin va mener une véritable enquête pour en trouver la cause. Cela permet de dédramatiser les examens à venir : ce sont simplement des outils pour comprendre.
- L'interrogatoire (Anamnèse) : C'est l'étape la plus importante. Le médecin vous posera des questions très précises :
- Où ? Décrivez précisément la zone touchée (quels doigts ? tout le pied ? un côté du corps ?).
- Quand ? Est-ce que ça arrive la nuit ? Le matin au réveil ? Après un effort ?
- Comment ? S'agit-il de picotements ? De brûlures ? D'un engourdissement ?
- Depuis quand ? Quelques jours ? Plusieurs mois ?
- Facteurs déclenchants ou aggravants ? Certains mouvements, certaines positions ?
- Autres symptômes ? Douleur, faiblesse, fatigue, problèmes de vision ?
- Vos antécédents médicaux, vos traitements, votre mode de vie (alimentation, alcool).
- L'examen clinique : Le médecin va ensuite vous examiner pour chercher des indices objectifs. Il va tester :
- La sensibilité : Avec un coton ou une petite pointe, il vérifiera si vous sentez bien le contact sur les zones concernées et de manière symétrique.
- Les réflexes ostéo-tendineux : Le fameux coup de marteau sur le genou, le coude...
- La force musculaire : Il vous demandera de serrer ses mains, de pousser contre lui avec vos pieds...
- La coordination et l'équilibre : Marcher sur une ligne, test doigt-nez...
- Les examens complémentaires (si nécessaires) :
- Une prise de sang : C'est souvent la première étape pour rechercher des causes simples : dosage de la vitamine B12, de la glycémie (diabète), bilan thyroïdien, recherche d'inflammation...
- Un électromyogramme (EMG) : C'est l'examen clé pour étudier la santé des nerfs. Il mesure la vitesse de conduction de l'influx nerveux le long d'un nerf et l'activité électrique de vos muscles. Il est très utile pour confirmer une compression nerveuse comme un syndrome du canal carpien ou une atteinte des nerfs dans le cadre d'une neuropathie.
- L'imagerie médicale : Une IRM ou un scanner peuvent être demandés pour visualiser une structure qui pourrait comprimer un nerf : une hernie discale au niveau de la colonne vertébrale, ou des lésions dans le cerveau ou la moelle épinière en cas de suspicion de sclérose en plaques ou d'AVC.
5. Quels sont les Traitements ?
Le traitement de la paresthésie dépend entièrement de sa cause. C'est pourquoi le diagnostic est si important.
Le traitement de la cause (la priorité absolue)
L'objectif principal est de s'attaquer à la racine du problème. Les solutions sont donc aussi variées que les causes :
- Carence en vitamines : Une supplémentation en vitamine B12 (par injections ou par voie orale) corrigera le problème.
- Syndrome du canal carpien : Le traitement peut aller du port d'une attelle la nuit à des infiltrations de corticoïdes, et si cela ne suffit pas, à une petite intervention chirurgicale pour libérer le nerf.
- Hernie discale : Le traitement repose le plus souvent sur des antalgiques, des anti-inflammatoires et de la kinésithérapie. La chirurgie n'est envisagée qu'en cas d'échec ou de signes de gravité.
- Diabète : Le pilier du traitement est un meilleur équilibre de la glycémie grâce au régime, à l'activité physique et aux médicaments. Cela permet de freiner, voire stopper, l'évolution de la neuropathie.
- Hypothyroïdie : Un traitement hormonal substitutif résoudra les symptômes.
Les traitements symptomatiques
Parfois, la cause ne peut pas être éliminée (comme dans certaines neuropathies chroniques) ou le temps que le traitement de fond agisse, il faut soulager l'inconfort. Ces traitements visent à calmer les sensations désagréables :
- Médicaments contre les douleurs neuropathiques : Ce sont des médicaments spécifiques qui agissent sur les signaux nerveux "parasites". Les plus utilisés appartiennent à la famille des antiépileptiques (gabapentine, prégabaline) ou des antidépresseurs (amitriptyline, duloxétine), utilisés à des doses différentes de celles pour l'épilepsie ou la dépression.
- Traitements locaux : Des crèmes ou des patchs à base de capsaïcine (un extrait de piment) ou d'anesthésiques locaux (lidocaïne) peuvent être appliqués sur la zone douloureuse pour la désensibiliser.
- Thérapies complémentaires et alternatives :
- La kinésithérapie est essentielle pour travailler la posture, la mobilité et renforcer les muscles.
- La neurostimulation électrique transcutanée (TENS) utilise un petit appareil qui envoie de faibles courants électriques via des électrodes sur la peau pour brouiller les messages de douleur.
- L'acupuncture, la relaxation, la sophrologie ou l'hypnose peuvent aider certains patients à mieux gérer les sensations désagréables et la douleur chronique associée.
6. Que Puis-je Faire Moi-même ? Conseils et Prévention
Vous n'êtes pas passif face à la paresthésie. Vous pouvez jouer un rôle actif pour la prévenir ou diminuer sa fréquence, surtout si elle est liée à des causes mécaniques ou à votre mode de vie.
- Adoptez de bonnes postures : Au bureau, assurez-vous que votre siège, votre écran et votre clavier sont bien positionnés pour éviter les tensions au niveau du cou et des poignets. Évitez de croiser les jambes trop longtemps.
- Faites des pauses et étirez-vous : Si vous avez un travail sédentaire ou répétitif, levez-vous, marchez et étirez-vous toutes les heures. Faites des mouvements de rotation avec vos poignets et votre cou.
- Améliorez votre sommeil : Évitez de dormir sur votre bras ou dans des positions qui pourraient comprimer un nerf.
- Ayez une alimentation saine et équilibrée : Une alimentation riche en fruits, légumes et céréales complètes vous assurera un bon apport en vitamines et minéraux essentiels pour vos nerfs.
- Pratiquez une activité physique régulière : Le sport améliore la circulation sanguine dans tout le corps, y compris dans les nerfs, et aide à maintenir un poids santé.
- Gérez votre diabète : Si vous êtes diabétique, un contrôle rigoureux de votre glycémie est la meilleure prévention contre la neuropathie.
- Limitez votre consommation d'alcool : L'alcool est toxique pour le système nerveux.
Conclusion : Un Symptôme à Écouter, Sans Paniquer
La paresthésie est un signal que votre corps vous envoie. Le plus souvent, il s'agit d'un message anodin et temporaire. Mais lorsqu'il persiste, il devient un symptôme qu'il faut écouter. Comprendre ses origines possibles est la première étape pour dédramatiser la situation. La seconde, et la plus importante, est d'en parler à votre médecin. Lui seul pourra poser un diagnostic précis, vous rassurer, et vous proposer une prise en charge adaptée.
N'oubliez jamais : vous n'êtes pas seul face à ces sensations. Des millions de personnes les ressentent, et dans la grande majorité des cas, des solutions existent pour retrouver confort et tranquillité d'esprit.
